La Cour d’appel de Chambéry rappelle avec force le droit fondamental de tout associé à rester dans la société.
On sait que la pratique de reconstitution des capitaux propres par le « coup d’accordéon » est valable à condition que la décision ne constitue pas un abus de majorité et qu’elle est justifiée par la survie de la société (Cour d’Appel VERSAILLES, 29 Novembre 1990 : Juris Data n° 1991-600216, Cass. Com., 25 Janvier 2005).
Mais il ne faut pas oublier que la réduction de capital ne doit pas porter atteinte aux droits et obligations des associés les uns par rapport aux autres (C. com., art. L. 223-34, al. 1er), de même qu’une augmentation de capital ne peut avoir pour effet d'avantager certains associés par rapport aux autres. Les opérations sur le capital social ne doivent en effet pas être un moyen d'évincer certains associés.
C’est ce qu’avaient tenté deux des trois associés d’une SARL détenant 75 % du capital, qui lors d’une Assemblée mixte ont réduit le capital à zéro avant de se réserver la possibilité de souscrire à l’augmentation, excluant de fait le troisième associé.
Le principe est choquant, mais la jurisprudence est relativement peu fournie en la matière.
La Chambre civile de la Cour d’appel de Chambéry, dans un arrêt du 24 janvier 2012 se réfère aux droits fondamentaux des associés pour sanctionner cette pratique :
« Attendu que l’opération consistant en la réduction à zéro du capital social suivie de son augmentation ne peut, en aucun cas, porter atteinte aux droits fondamentaux des associés, notamment à celui de pouvoir rester dans la société, de sorte que la possibilité de souscrire aux nouvelles parts émises pour reconstituer le capital doit être offerte à chacun d’eux, sans exclusive».
Il est donc rappelé qu’il ne peut en aucun cas être porté atteinte au principe d’égalité entre les associés et que la réduction du capital social ne doit pas être un moyen d’évincer certains d’entre eux.
En particulier, tous les associés doivent pouvoir, au terme de la réduction du capital, souscrire à l’augmentation dans le cadre de la reconstitution du capital.
Cela renvoie au principe selon lequel tout associé a le droit de rester dans la société et ne peut en être exclu ni contraint de céder ses parts ou actions contre son gré sauf si la loi ou les statuts en disposent autrement (Cass. com. 12 Mars 1996 Rev. Sociétés p. 554).
A la différence des sociétés anonymes, les parts de sociétés à responsabilité limitée ne comportent légalement aucun droit préférentiel de souscription aux augmentations de capital.
Si le droit des SARL permet à la collectivité des associés de créer un droit préférentiel de souscription lors d’une augmentation de capital, celui-ci ne peut qu’être réservé au profit de l’ensemble des anciens associés en vertu du principe d’égalité entre associés, sauf la possibilité de créer différentes catégories de parts sociales assorties ou non du droit préférentiel, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
Ce principe pourtant évident méritait d’être rappelé.